Claude Frenette - Photographe - Compositeur
Le hasard éliminé
1982
Pour flute, clarinette et percussions
Environ 13’
Cette composition est probablement la plus minimaliste de ma production. Je travaillais à l’époque sur la notion d’hétérophonie pour une recherche dans le cadre de mes études de maitrise en composition à l’Université de Montréal - inspiré par le magnifique O King (2e mouvement de la Sinfonia, 1968) de Luciano Berio, probablement le plus bel exemple d’hétérophonie dans le répertoire du 20e siècle. Je définirais l’hétérophonie comme étant une superposition de différents aspects d’une même structure.
Mon objectif était de comprendre et de pousser cette notion à ses extrêmes , aux limites de l’absurde, pour en faire un outil d’inspiration et de structuration de la composition. Il y a dans cette oeuvre, des hétérophonies de hauteurs, de vibratos et de battements (frictions chromatiques).
Lors de la présentation en concert de cette oeuvre, le critique Gilles Potvin (le Devoir, 31 mai 1982) à dit de cette musique qu’elle « … propose une série d’évènements discrets, d’une sonorité feutrée et d’un raffinement très poussé ». Je vous laisse en juger.
La partition est notée de façon graphique, sans mesure, en fonction du temps simplement, à la fois très libre, mais tout de même assez rigide.
La version que je vous présente ici a été enregistrée en concert et diffusée en direct sur les ondes de Radio-Canada.
Note de programme
Anne Jalbert, flutes
Nicolas Desjardins, clarinettes
Jean-Guy Plante, persussions
Le hasard éliminé
au fond du verre
la pupille réfractaire projette ses fantasmes
sur l’épitaphe en couronne de fumée
et les yeux maquillés des filles
pleurent
il ne sert à rien d’attendre
puisque les dés ont atteint le degré de conscience
qui élimine le hasard
(Nicole Desrosiers)
Il s’agit d’une oeuvre où la précision du détail l’emporte sur l’élan formel. Huit ou neuf hauteurs, fixées dans des registres précis, servent de pôle d’attraction aux sons. L’emploie du quart de ton et des différentes vitesses de vibrato y sont déterminants puisqu’ils servent, selon un principe d’hétérophonie, à créer des battements qui sont essentiels à l’oeuvre.
C’est au niveau de las sémantique que la musique rejoint le poème de Nicole Desrosiers. C’est le dépouillement de la matière, l’élimination de l’accessoire pour ne retenir que l’essentiel de cette atmosphère de tension.